Focus

Nouveaux enjeux pour les relations internationales en période de pandémie

Fortement perturbées par la Covid-19, les mobilités internationales s’adaptent à de nouvelles modalités. Volontariste sur la question, l’Unistra s’efforce de trouver des réponses alternatives et innovantes. Et de faire en sorte que les mobilités virtuelles se développent, en complément de la mobilité physique.  

Difficultés d’obtention de visas, vols supprimés, établissements annulant les échanges d’étudiants… Partout dans le monde, la pandémie de Covid-19 a mis un sérieux coup de frein aux mobilités de tous ordres, et notamment universitaires.

À Strasbourg, on note une baisse de 17,4 % des départs d’étudiants prévus en Erasmus+ par rapport à l’an dernier. S’agissant de ceux venant étudier en Erasmus+, la baisse est plus prononcée, avec -53 % d’arrivées pour les séjours d’une année. Si la mobilité en Europe est toujours possible, la mobilité hors Europe est bien plus compliquée : on note une chute des échanges internationaux pour le premier semestre, avec un report vers le second semestre.

« L’année de l’Europe »

« Il s’agit de tendances : les chiffres sont en perpétuelle évolution », rappelle toutefois Irini Tsamadou-Jacoberger. La vice-présidente Relations internationales de l’université tient à rester optimiste.

Dès le lendemain du confinement, Strasbourg a affiché son engagement de maintenir la dynamique de ses échanges, entrants comme sortants. Sauf que… cette politique volontariste fait plutôt figure d’exception. « Certains de nos partenaires hors Europe – Australie, Japon et Amérique du Nord en tête – ont mis un coup d’arrêt aux mobilités, entrantes comme sortantes. On imagine mal les voir changer d’avis au second semestre. » Dans ce contexte, certains étudiants, désireux de réaliser une mobilité malgré tout, réorientent leurs choix de destination : « Cette année devrait être celle de l’Europe ».

« Côté dynamique des projets, de nouvelles modalités de travail se mettent en place : le développement de nos partenariats internationaux se poursuit en visio », précise Rachel Blessig, directrice de la Direction des relations internationales (DRI). Et de citer « des discussions avec un prestigieux établissement russe », ou « un accord de short term programmes tout juste conclu avec une université de Corée du Sud. Les étudiants coréens concernés réaliseront une mobilité “virtuelle”, en suivant de Séoul des cours disciplinaires strasbourgeois et en échangeant à distance avec des étudiants strasbourgeois ».

Le maître-mot : adaptation, doublée d’agilité et d’innovation. « Le virtuel ne remplace pas la mobilité physique, mais peut devenir complémentaire. Cela ouvre de nouvelles possibilités pour préparer une mobilité, ou pour les publics empêchés », souligne Irini Tsamadou-Jacoberger, rappelant que la politique de relations internationales de l’établissement concerne aussi bien les étudiants et les enseignants-chercheurs que les personnels Biatss. L’adaptation, il en a encore été question lors de la journée d’accueil des étudiants internationaux, début septembre : tous n’ayant pu être présents, l’événement a été filmé et mis en ligne. « Afin d’accompagner au mieux les étudiants internationaux, un nouveau dispositif de parrainage par leurs pairs a également été mis en place. »

Mobilité depuis chez soi

A Sciences Po Strasbourg, « quasiment aucun de nos étudiants n’a pu partir hors Europe. Certains se retrouvent à suivre les cours de leur université partenaire derrière leur ordinateur, depuis la France, constate Caroline Lehni, directrice déléguée aux relations internationales de l’école. D’autres depuis leur nouveau logement anglais ou norvégien alors que, dans certains cas, les étudiants locaux sont dans l’amphi. Outre toutes les difficultés de socialisation que ça pose, c’est aussi compliqué en termes de pédagogie. » Solution trouvée à cette situation inédite : la mise sur pied d’un campus virtuel « avec des cours inédits, non pas du présentiel transposé au numérique, mais pensés en tant que tels » (lire encadré).

Doit-on s’attendre, pour l’année prochaine, à une baisse encore accrue des inscriptions d’étudiants étrangers ? « Pour l’instant, celle-ci n’est pas spectaculaire », assure-t-on du côté de la DRI. Une chose est sûre : ce n’est pas le montant des frais à payer qui pourra être un frein, la non-application des droits différenciés pour les étudiants extra-communautaires ayant été reconduite à l’unanimité au dernier conseil d’administration (29 septembre). « Appliquer cette hausse aurait été un très mauvais signal à envoyer en cette période », estime le président de l’université, Michel Deneken.

Elsa Collobert

Bon à savoir

25 cours pour un campus virtuel unique

Tout comme l’Ecole de management (EM) Strasbourg, une année d’études obligatoire à l’étranger est prévue à Sciences Po Strasbourg (la 3e). « On n’a tout simplement pas la place ni les programmes pour les accueillir », précise Caroline Lehni. Dès mai, quand il commence à être clair que l’année universitaire sera impactée, il a fallu trouver une solution. »

Celle-ci prend la forme d’un campus virtuel (que présente Caroline Lehni sur la photo), mis sur pied avec les six autres Sciences Po de région et celui de Grenoble. « Notre appartenance à ce réseau compte parmi nos forces. Cela nous a permis de mettre sur pied 25 cours inédits, mutualisés. Onze de nos enseignants ont été impliqués. Au programme figurent des cours disciplinaires comme « Le genre et les politiques sociales », « Socio-histoire de l’État secret  » » ou encore « Histoire des épidémies depuis la Grande Peste ».  En anglais, en espagnol et en français, car ils s’adressent aussi aux quelques « visitants » étrangers à Sciences Po, à la fois ceux présents à Strasbourg et ceux restés dans leur pays.

L’approche pédagogique est spécifiquement pensée pour le distanciel : partage de ressources, évaluation formative sous forme de QCM, travail personnel guidé, cours asynchrones pouvant être consultés à toute heure, accès limité à 30 étudiants. Autre atout dans la manche de Sciences Po : « Le fait d’être partie intégrante de l’Unistra nous a permis de bénéficier des formations de l’Institut de développement et d’innovation pédagogiques (Idip). Enfin, le soutien financier de l’université à travers une augmentation de notre dotation en heures complémentaires a été déterminante dans le déploiement du campus virtuel. ». Les cours ont débuté lundi 12 octobre.

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