Recherche et valorisation
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L’orthorexie, nouvelle pratique ou trouble alimentaire ?

Les habitudes alimentaires sont de plus en plus incriminées dans le développement de nombreuses maladies comme l’obésité, les maladies cardiovasculaires ou encore les cancers. Ainsi, médecins et médias nous incitent à manger mieux, plus sainement, plus équilibré. Rien d’étonnant alors à ce qu’émergent de nouvelles pratiques alimentaires liées à l’obsession du « manger sain ».

Cette obsession de nourriture saine baptisée orthorexie intéresse depuis plusieurs années Camille Adamiec, doctorante en sociologie1 et on fait l'objet de plusieurs publications récentes2. En 2009, dans le cadre d’un premier stage de master 1, elle découvre ce phénomène décrit aux États-Unis dès le début des années 2000 par le Dr Bratman. Alors qu’un anorexique est obsédé par la quantité de nourriture qu’il avale, un « orthorexique » est fixé sur la qualité des aliments qu’il ingère. L’objectif de Camille est de mieux cerner d’un point de vue sociologique ce phénomène d’orthorexie, alors en émergence en France, de comprendre les enjeux des pratiques alimentaires qui en découlent et de définir le profil des orthorexiques. « Dans un premier temps, je me suis basée sur des informations et données trouvées sur des forums et des blogs », explique la doctorante. L’étude de ces témoignages mis en scène sur internet a révélé des personnes souvent angoissées par l’avenir, très soucieuses de maîtriser leur vie et en particulier ce qu’elles mangent. «  Elles appliquent à elles-mêmes un contrôle que la société ne réalise pas de manière suffisante sur les aliments, leur fabrication, leur mise en vente, etc. », constate Camille. Ces individus instaurent des rituels d’achats, de préparation et de cuisson des aliments. Tout est planifié, organisé pour tout contrôler, ce qui leur procure à la fois un sentiment de supériorité et une sensation de pouvoir. Peu à peu ces pratiques alimentaires rigidifient leur quotidien et les isolent du reste de la société, puisqu’il leur est de plus en plus difficile de partager un repas avec d’autres convives n’ayant pas les mêmes pratiques.

Un mode de vie pour apaiser ses angoisses

Plus récemment, dans le cadre de son travail de thèse, Camille a réalisé de nombreux entretiens de terrain qui lui ont permis de nuancer considérablement ses premiers constats, et d’affiner le profil des personnes orthorexiques. « Si les personnes que j’ai rencontrées ont parfois des pratiques alimentaires surprenantes, elles n’en restent pas moins justifiées et rationnelles de leur point de vue », souligne Camille. « De manière générale, elles ne se sentent ni exclues, ni en souffrance. Pour elles, cette éthique de vie les aide à gérer leurs inquiétudes, à les rendre plus heureux et à aller mieux. Les contraintes qui en découlent sont choisies et assumées. » Ainsi, la doctorante a rencontré assez peu « d’extrémistes ». Contrairement à ce que pouvaient laisser penser les propos recueillis sur les forums, les orthorexiques gardent une certaine souplesse et ouverture aux autres et sont très perméables aux regards et dires des autres. « Comme tout individu, ils s’efforcent de trouver un juste équilibre entre le désir d’une identité propre qu’ils expriment à travers leurs pratiques alimentaires et l’envie d’appartenir à un groupe. »

Si l’orthorexie est considéré comme un trouble du comportement voire une maladie aux USA, ce terme n’est pas « officiellement » employé dans le domaine médical en France. « De mon point de vue, il s’agit plus d’un choix de mode de vie. Au-delà des pratiques alimentaires, ces personnes sont très attentives à leur hygiène de vie au sens large, à leur bien-être mais aussi à l’environnement et à l’écologie », conclut la sociologue. « Il faudrait trouver une nouvelle terminologie pour qualifier ces pratiques car à mon sens le terme d’orthorexie est déjà galvaudé ».

Anne-Isabelle Bischoff

1 Laboratoire Cultures et sociétés en Europe (UMR 7236)

2 "En quête d'équilibre alimentaire: l'orthorexie" - Nutritions et endocrinologie - n°1055 - 25/06/2012 et prochainement dans Objectif nutrition, la lettre d'information de l'Institut Danone (n°106 - décembre 2012)


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Médecine translationnelle : l’union fait la force

La Fédération de médecine translationnelle1 de Strasbourg (FMTS) a été inaugurée le 8 novembre au forum de la Faculté de médecine. Elle regroupe un grand nombre des unités de recherche vie et santé de la ville et une majorité de ses plateformes biomédicales. Objectif premier : gagner en visibilité sur la scène mondiale.

« À l’heure actuelle, la recherche biomédicale est éparpillée sur des sites différents à Strasbourg et chacun fait sa recherche dans son coin », explique Seiamak Bahram, professeur des universités, praticien hospitalier en immunologie et vice-doyen recherche de la Faculté de médecine. Ce dernier a donc décidé, avec Jean Sibilia, doyen de la Faculté de médecine, d’y remédier en unissant les laboratoires de recherche vie et santé au sein de la Fédération de médecine translationnelle de Strasbourg (FMTS).
« Pour officialiser cette création, nous attendions que le cycle d’évaluation des laboratoires par l’Aéres2 soit terminé ; les résultats positifs – avec notamment la labellisation Inserm de dix laboratoires strasbourgeois – nous ont conforté dans notre idée de regrouper les forces », confie le coordonnateur du projet.
Près de trente laboratoires et des centaines de chercheurs sont d’ores et déjà réunis dans cette fédération organisée en quatre programmes : immunologie-infection-inflammation, neurosciences, cancérologie et biomatériaux-imagerie-robotique médicale. « Le choix s’est fait en fonction de la cohérence scientifique et des masses critiques », confie Seiamak Bahram ; les thèmes retenus concernent donc une densité conséquente de chercheurs (plusieurs centaines dans chaque programme). L’objectif de cette union scientifique est triple. Il s’agit d’abord de gagner en lisibilité et visibilité nationale et internationale, il s’agit ensuite d’inciter les équipes à collaborer - et notamment sur des projets translationnels à savoir ceux allant du laboratoire de recherche vers le lit du patient et vice versa - mais également et surtout d’avoir « une force de frappe notamment pour les grandes demandes de financement ». D'ailleurs, un portail internet, disponible début 2013, permettra de faire connaître les équipes et leurs sujets et ainsi d’améliorer la visibilité à l’extérieur.

Pas de « chef » ni de murs

Cet ensemble est un peu particulier car les entités de recherche ne sont pas regroupées en un lieu - il s’agit avant tout d’une union intellectuelle – et n’ont pas de « chef » à proprement parler. Les laboratoires de chaque programme seront connectés à un centre de gravité : le nouveau bâtiment de la Faculté de médecine pour immunologie et neurosciences, Hautepierre et le futur Institut régional du cancer pour la cancérologie et l’IHU3 de Jacques Marescaux pour les biomatériaux. Et un binôme fondamentaliste-clinicien sera chargé d’animer chaque programme. Mais « les décisions scientifiques se prendront toujours au niveau des unités de recherche et chacune d’entre elles gardera son autonomie », rassure le coordonnateur de la FMTS, Seiamak Bahram.
Finalement, les règles de fonctionnement sont assez simples. « Pour faire partie de la FMTS, il suffit d’être une entité labellisée du domaine vie et santé, d’indiquer l’affiliation à la fédération dans les publications de l’équipe et surtout, insiste le coordonnateur, de vouloir aller de l’avant ! »

Floriane Andrey

1La médecine translationnelle est basée sur les preuves et met le patient au centre du processus de la recherche fondamentale et clinique.
2Agence d’évaluation de la recherche et de l’enseignement supérieur.
3Institut hospitalo-universitaire de chirurgie mini-invasive guidée par l’image.

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Partenariat entre Sémia et Conectus Alsace

Le 25 octobre dernier, l’incubateur d’entreprises innovantes en Alsace, Sémia, et Conectus Alsace, ont signé un accord de partenariat stratégique, afin d'améliorer la qualité des projets de création d’entreprises issues de la recherche publique alsacienne. Le deuxième objectif est également d'accélérer le processus de création, au bénéfice des porteurs de projets.

Conectus Alsace et Sémia sont « complémentaires » dans le processus menant à la création d’entreprises issues de la recherche publique. Conectus Alsace se concentre sur le renforcement de la propriété intellectuelle issue des laboratoires publics, sur l’investissement dans la « preuve de concept » technico-économique des technologies, et sur la détermination de la stratégie de valorisation à privilégier. De son côté, Sémia accompagne le créateur d’entreprise tout au long du processus de création, encadre la mise en place des fondamentaux de l’entreprise et de l’équipe opérationnelle. La qualité de la collaboration entre Sémia et Conectus Alsace est un facteur de succès essentiel dans le processus de création d’entreprises innovantes.

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Deux nouvelles colonies de manchots empeureurs en Antarctique

Alors que la colonie de manchots empereurs de Dumont d'Urville, en Terre Adélie, compte à ce jour environ 2 500 couples reproducteurs, deux nouvelles colonies de plus de 6 000 poussins au total, soit au moins 12 000 reproducteurs, viennent d'être observées à proximité du glacier Mertz, à environ 250 km de la base française Antarctique par les chercheurs André Ancel et Yvon Le Maho, de l'Institut  pluridisciplinaire Hubert Curien de Strasbourg (CNRS et Université de Strasbourg). Comme un couple ne peut élever qu’un seul poussin par année de reproduction, cela porte la population de manchots empereurs à au moins 8 500 couples dans ce secteur de l’Antarctique, soit trois fois plus que la dernière estimation.

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Nouveau sondage du ciel pour percer les mystères de l’énergie et de la matière noires

Des chercheurs français, notamment du CEA1, du CNRS, de l’Université Paris-Diderot, du Centre de données astronomiques de Strasbourg et de l’UPMC2, et canadiens viennent de publier le grand sondage cosmique « Legacy » du Télescope Canada France Hawaii (CFHTLS).

Ce sondage est le produit d'un programme d'imagerie multi-couleur unique qui explore un volume extrêmement large de l'Univers et collecte des dizaines de millions de galaxies dont certaines sont distantes de plus de 9 milliards d'années lumière de la Terre. Piloté par l’observatoire Canada-France-Hawaï (CFHT), ce catalogue représente une véritable mine d'or pour la recherche astrophysique des années à venir, et constitue d’ores et déjà un modèle dont s’inspirent les autres observatoires à travers le monde. En effet, les données recueillies sont essentielles à la compréhension des deux énigmes majeures de l’Univers : l’énergie noire et la matière noire.
La matière noire et l'énergie noire dominent l'Univers mais ni l'une ni l'autre ne peuvent être aujourd’hui vues ni identifiées. Les chercheurs peuvent en revanche mesurer les effets de l'énergie noire sur le taux d'expansion du cosmos. Le CFHTLS souhaitait aussi cartographier la mystérieuse matière noire à une échelle inédite, à partir des déformations que celle-ci induit sur la forme des galaxies. Ceci a nécessité la combinaison cruciale d'observations profondes de l'Univers sur de grandes régions du ciel et le développement de méthodes avancées d'analyse des données. 
Ces résultats font l’objet d’une publication sur le site du CFHTLS.fileadmin/upload/L_Actu/L_Actu_N_65/Arts_sciences_et_culture/lesmysteresdelenergieetdelamatierenoires261012sousembargo.pdf

1Commissariat à l'énergie atomique
2Université Pierre-et-Marie-Curie

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Un assemblage de nano-machines pour mimer le muscle

Pour la première fois, un assemblage de milliers de nano-machines capables de produire un mouvement de contraction coordonné s'étendant jusqu'à une dizaine de micromètres, à l'instar des mouvements des fibres musculaires, a été réalisé par une équipe de l'Institut Charles Sadron du CNRS. Ces travaux novateurs menés par Nicolas Giuseppone, professeur à l'Université de Strasbourg, et impliquant des chercheurs du Laboratoire de matière et systèmes complexes (CNRS/Université Paris Diderot), valident expérimentalement une approche biomimétique conceptualisée depuis plusieurs années dans le domaine des nanosciences. Ils permettent d'envisager de très nombreuses applications en robotique, en nanotechnologie pour le stockage d'information, dans le domaine médical comme la réalisation de muscles artificiels ou pour concevoir d'autres matériaux incorporant des nano-machines (dotés de nouvelles propriétés mécaniques). Ces travaux viennent de paraître sur le site de la revue Angewandte Chemie International Edition.